À l’occasion de septante ans d’anniversaire de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, l’UE n’a pas fléchi. Son conseil a prolongé les mesures restrictives contre la RDC. Elles sont étendues à la période allant jusqu’au 12 décembre 2019, soit une année. Cette décision consiste en un gel des avoirs et d’une interdiction de visa pour l’UE. Ramazani Shadary et ses alliés sont accusés d’entraves au processus électoral en cours et de violations des droits de l’homme. Ces accusations datent de l’époque pendant laquelle Shadary était vice-premier ministre et ministre en charge de l’intérieur.
De leurs côtés, l’actuel candidat désigné par le président Joseph Kabila pour la présidentielle avec les quatorze autres responsables officiels congolais, ont sollicité auprès du Conseil de l’UE “le respect de leur droit fondamental d’être entendus” et la levée des mesures restrictives qu’ils estiment “humiliantes, dégradantes et disproportionnées”.
“Zéro élu réélu”
À quelques jours des scrutins législatifs et présidentiels qui devaient se tenir le 30 décembre, ces condamnations nourrissent le discours des différents candidats de l’opposition. Ces opérateurs politiques trouvent un écho auprès d’autres acteurs de la société civile. Selon Pascal Mupenda, secrétaire exécutif de l’organisation “Partenariat pour la protection intégré”, la population doit sanctionner négativement toutes les personnalités politiques qui ont trempé dans des abus vis-à-vis des droits de l’homme en RDC.
Les mouvements citoyens œuvrant sur l’ensemble du pays ont lancé une campagne dénommée “zéro élu réélu”. Cette approche vise à sensibiliser la population à ne plus voter pour la classe politique actuelle qui est au pouvoir depuis 2006. “Il faut que la population renouvelle la classe politique en accordant le pouvoir décisionnel à la jeunesse”, martèle Judith Maroy, militante de la “Lutte pour le changement”, Lucha à Bukavu, ajoutant que la pilule sera sûrement amère pour beaucoup de candidats qui n’auront pas été fidèles à leurs promesses.
Les militants de l’opposition en RDC satisfaits de la position de l’Union Européenne contre le dauphin de Kabila PHOTO Adolphe Debaba
Des candidats favorisés, d’autres empêchés d’atteindre leur base électorale
Pendant la campagne électorale, quelques incidents ont été notés dans quelques villes de la RDC. Les cas de Lubumbashi et de Kamituga en disent long. Par contre, la majorité au pouvoir se vante du respect de l’éthique liée au déroulement du processus électoral. Pourtant, certains candidats à la présidence de la République sont empêchés de se déplacer sur l’ensemble du territoire afin de battre campagne. L’exemple de Martin Fayulu qui a vu ses avions bloqués en Afrique du Sud est éloquent. Lui-même a été empêché d’atteindre sa base électorale à Kindu, dans la province du Maniema, fief du dauphin de Kabila.
Pendant son séjour en Europe, Denis Mukwege, récent prix Nobel de la paix pour son action en faveur de la réparation des femmes mutilées sexuellement, s’est opposé à une “probable levée de sanctions”. Son plaidoyer semble trouver grâce auprès des instances de l’Union européenne, notamment son Conseil. Plusieurs organisations de la société civile proches de la Fondation Panzi, structure à caractère philanthropique au sein de laquelle évolue le docteur Denis Mukwege, ont soutenu la démarche entreprise par le “réparateur des femmes” qui a été contre une probable levée des sanctions à charge de ces personnalités politiques, policières et militaires congolaises.
“Ces sanctions doivent être maintenues au-delà des élections”, recommande Roger Buhendwa, activiste des droits de l’Homme et responsable du projet Badilika de la fondation Panzi. Déterminés, les amis de la Fondation Panzi proposent même au parlement européen d’étendre ces sanctions à d’autres membres de l’appareil répressif de l’Etat congolais.
M. Nzolantima, un des membres de cette association au niveau de Kinshasa, confie à un journal local que cette attitude préviendrait toute tentative de violations des droits humains surtout pendant la fièvre électorale.
L’ONG Human Rights Watch s’est également prononcée sur cette question dans une lettre aux responsables et ministres de l’Union européenne, datée du 30 novembre et diffusée le 4 décembre : “nous vous écrivons pour exhorter votre gouvernement à soutenir le renouvellement et l’élargissement des sanctions ciblées de l’Union européenne à l’encontre d’officiels de haut rang de la République démocratique du Congo”.
Egide Kitumaini
Journaliste au Souverain Libre