07
Déc
2018

Marche pour le climat, gilets jaunes... Deux soulèvements populaires aux méthodes opposées. Sont-ils efficaces ?

Manifestation pour le climat dans les rues de Bruxelles le 2 décembre. Photo : S. Anciaux.

Marche pour le climat, gilets jaunes... Deux soulèvements populaires aux méthodes opposées. Sont-ils efficaces ?

07 Déc
2018

Pourquoi manifester en 2018 ?

75.000 marcheurs ont battu les pavés dans la capitale ce dimanche 2 décembre. 75.000 marcheurs bravant la pluie bruxello-bruxelloise. 75.000 marcheurs parmi lesquels des enfants, des parents, des scouts, des retraités, des jeunes travailleurs, des agriculteurs et des gilets jaunes. 75.000 marcheurs dont Marie-Christine Marghem qui, le soir même, prenait un jet privé pour se rendre à la COP 24, en Pologne. Derrière l’ironie de la situation, une question se pose : est-ce encore utile de manifester en 2018 ?

Deux manifestations, deux ambiances

Vendredi 30 novembre 2018, onze heures, au croisement de la rue de la Loi et de la petite ceinture. C’est une masse jaune fluo aux bandes argentées qui déferle sous la vague de feux de signalisation de la rue la plus connue de Bruxelles. Les images de voitures de police incendiées font le tour de la Belgique instantanément et, au passage, décrédibilisent le mouvement.

Deux jours plus tard, le même carrefour est traversé par 75.000 personnes dans le cadre de la marche pour le climat, le tout dans une ambiance joyeuse et familiale. Deux méthodes pour deux manifestations.

Au cours du temps, le profil-type du manifestant a changé. Il est plus jeune et moins violent.

Pourtant, ce mardi 4 décembre, une délégation de gilets jaunes s’est rendue au Lambermont pour s’entretenir avec le Premier ministre. Dans le courant de la journée, la Belgique n’ayant pas trouvé d’accord entre ses entités fédérées, refuse les objectifs européens en matière d’efficacité énergétique et s’abstient lors du vote sur une directive concernant les énergies renouvelables. On pourrait en déduire qu’une manifestation violente et polémique atteint les plus hautes sphères du pouvoir, alors que le plus grand rassemblement pour le climat jamais organisé en Belgique, dans une ambiance pacifiste, semble n’avoir aucun impact sur nos décideurs.

La violence, un levier efficace

Tanguy Wéra, auteur du texte Les condescendants sur le média Autrement dit, analyse cette violence en termes d’efficacité pour faire pression sur le gouvernement. “On constate que les gilets jaunes sont un nombre limité d’acteurs avec un message bien moins clair et structuré, mais parce qu’ils s’expriment de manière violente, parce qu’ils portent atteinte à l’ordre public, ils sont plus facilement entendus. »

Pour lui, la violence dont font preuve certains gilets jaunes aujourd’hui est une réponse aux violences politiques de l’état infligées aux classes les plus populaires. « Il y a encore une place pour une démocratie où on dialogue, mais c’est vrai que parfois on pourrait se laisser tenter par la violence”.

Dans un rapport du CFE-CGC (syndicat français de l’encadrement), de Michel de Laforce, le profil du manifestant type a évolué depuis les grandes vagues de manifestations du siècle dernier. Le manifestant est plus jeune, vient de différents milieux sociaux et surtout, il est moins violent que par la passé. Il y a certes des casseurs au sein des mouvements de désobéissance tels que les gilets jaunes, mais ceux-ci ne représentent pas l’ensemble du mouvement.

Le cadre légal des manifestations se restreint de plus en plus suite aux attentats.

Là où Michel de Laforce et Tanguy Wéra se rejoignent, c’est dans l’idée que les mouvements contestataires ne doivent pas s’arrêter au journal de 20 heures, une manifestation n’est pas un moment hors du temps. La marche pour le climat doit être considérée comme un message envoyé aux politiques, message qui n’a pas été reçu.

Toujours selon Tanguy Wéra, la force d’une manifestation tient au pouvoir galvanisant, à l’énergie qu’elle peut diffuser dans la foule. “On a besoin de se rassembler, d’être ensemble et de scander des slogans, mais il ne faut pas résumer la lutte à une manifestation, c’est un combat continu. Il appartient aussi aux acteurs de continuer le combat par d’autres moyens de protestation, comme le boycott, l’engagement politique ou dans des collectifs citoyens“.

L’expression d’une population dominée

Selon Manuel Cervera-Marzal, sociologue et auteur de Les nouveaux désobéissants : citoyens ou hors-la-loi ?, nos états ne sont plus des démocraties, mais des oligarchies. La majorité de la population est dominée par une minorité. Cette oligarchie, Manuel Cervera-Marzal invite à la repenser par le prisme de la désobéissance civile. Le sociologue ne partage pas l’idée que les manifestations et les mouvements sociaux se radicalisent avec le temps. Dans une vidéo accordée au média Datagueule, il affirme que ce n’est pas le peuple qui se radicalise, mais bien l’État.

Au travers de réformes autoritaires et sécuritaires, l’État réduirait le cadre légal des contestations, notamment avec la loi sur le service minimum que le sociologue juge liberticide.

Dans un contexte où le cadre légal des contestations se resserre au même rythme que la surdité des autorités grandit, les manifestants considèrent la violence comme dernier recours faire entendre leurs revendications. Est-elle pour autant admissible?

Charte des commentaires

Le contenu des commentaires ne doit pas contrevenir aux lois et réglementations en vigueur. Sont notamment illicites les propos racistes, antisémites, diffamatoires ou injurieux, divulguant des informations relatives à la vie privée d’une personne, et utilisant des œuvres protégées par les droits d’auteur (textes, photos, vidéos…) sans en mentionner la source. La rédaction du BBB se réserve le droit de supprimer tout commentaire susceptible de contrevenir à la présente charte, ainsi que tout commentaire hors-sujet, répété plusieurs fois, promotionnel ou grossier. Par ailleurs, tout commentaire écrit en lettres capitales sera supprimé d’office. Les commentaires sont modérés a priori.

Laisser un commentaire

Lire les articles précédents :
Des personnes retirent de l'argent.
Les frais bancaires : pas cachés, mais mal expliqués

Dès janvier 2019, les clients de chez ING possédant un compte Lion Account se verront retirer 0,50€ pour chaque retrait...

Fermer