Le débat qui anime la communauté agricole depuis quelques années concentre toute son attention sur une question brûlante : l’agriculture industrielle est-elle vouée à disparaître au profit de l’agriculture biologique ? Ou est-elle au contraire synonyme de progrès et d’avancée sociale ? Les agriculteurs, les syndicats, les politiques et les experts s’affrontent fébrilement sur les plateaux de télévision. La première édition des Ateliers de Couthures, le festival international de journalisme vivant, n’a pas échappé à la règle ce vendredi 29 juillet.
La faute aux pesticides ou à la compétitivité ?
D’un côté, un défenseur de l’agriculture industrielle, fatigué d’appartenir à une catégorie en permanence pointée du doigt par les médias. Philippe de Vergnette, exploitant agricole et ancien responsable FDSEA (Fédérations départementales des syndicats d’exploitants agricoles) du Tarn-et-Garonne, se demande pourquoi on ne reconnait pas que certains agriculteurs font tout simplement bien leur travail. Ils apportent aux Français une nourriture “abondante, variée, et bonne pour leur santé”. Selon lui, les racines du problème sont à chercher au cœur même du système de compétitivité accrue, destructrice d’emplois. À la question de M. de Vergnette, “pourquoi érige-t-on le bio en religion, avec pour déesse la Nature et pour diable Monsanto ?”, le public, en majorité conquis par l’autre camp, laisse échapper des ricanements.
Le bio, bon pour la santé… des agriculteurs
De l’autre côté, des détracteurs de l’agriculture industrielle. Ceux qui défendent une agriculture biologique et durable. Patrick Herman, journaliste indépendant et paysan en agriculture biologique dans l’Aveyron, pose un “constat accablant et désastreux”. Les agriculteurs sont les premiers touchés par les produits qu’ils utilisent. Un rapport de juin 2013 de l’Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale), basé sur trente ans d’étude, met en évidence un lien fort entre l’exposition professionnelle aux pesticides et l’apparition de la maladie de Parkinson, d’un lymphome non hodgkinien, d’un cancer de la prostate ou d’un myélome multiple (sorte de cancer du sang). Maxime de Rostolan, coordinateur du projet “Fermes d’avenir”, va même jusqu’à parler du déversement d’un “poison sur la terre”.
Retrouver de vrais paysans
Mais ce débat sans fin s’enlise depuis des années, au risque d’occulter des problématiques tout aussi importantes. Par exemple aucune réponse n’a été proposée à la question essentielle qui était à l’origine de cette table ronde à Couthures : “Comment retrouver de vrais paysans ? Comment remettre du sens dans ce métier et contrer ses dérives ?” Dans l’ouvrage Malaise en agriculture, publié en 2014, les auteurs expliquent que “sur le plan identitaire, le découplage des aides et la reconnaissance de la multifonctionnalité de l’agriculture interrogent profondément la figure de l’agriculteur nourricier (…) L’agriculteur se retrouve à exercer un métier dont le sens diffère profondément de l’imaginaire qu’il s’en était fait et des pratiques héritées de la génération précédente”. Comme le concluait Maxime de Rostolan lors de son intervention, il devient urgent de faire revivre les territoires français et d’inventer de nouveaux métiers agricoles.
[…] De l’importance de recentrer le débat sur l’agriculture moderne COMPTE-RENDU. Agriculture industrielle VS agriculture biologique : deux conceptions de l’agriculture s’opposent lors de la table ronde « Comment retrouver de vrais paysans ? » […]