L’avancée du chantier « Rive gauche » crée une pollution visuelle autour de l’église Saint-Antoine de Padoue et en bloque certains accès. Un tour rapide des environs suffit pour la perdre de vue.
Visite sonore de l’église Saint-Antoine de Padoue avec un des intendants volontaires
Un homme en mission
Norbert Kitoumou arrive en provenance du Congo Brazzaville, l’homme d’église a été envoyé en mission par sa congrégation. La diocèse de Tournai recherchait une équipe de missionnaires pour la Ville Basse, ici à Charleroi. Suite à un appel à candidatures, Norbert a donc finalement débarqué en provenance d’Afrique pour prêcher la bonne parole loin de chez lui. “Nous sommes préparés à cela, missionnaire un peu partout dans le monde”. La congrégation Spirita à laquelle Norbert appartient se retrouve aux quatre coins du globe. L’homme missionné, depuis bientôt trois ans maintenant, est affilié à la paroisse de Saint-Antoine. Il pourrait voir son mandat renouvelé aux termes de ces trois premières années.
Une adaptation à la ville compliquée
L’homme a débarqué au moment du début des travaux, un contexte pas évident. ‘’Il n’y a presque plus personne qui habite au sein de la Ville Basse. Les maisons sont détruites pour en construire d’autres. Notre maison où les prêtres résident depuis l’existence de la paroisse a été vendue. Nous sommes dans l’attente d’une nouvelle demeure. Un curé est logé par la commune de manière légale, nous sommes donc dans l’attente’’.
Norbert rappelle l’importance d’être en ordre avec la loi, il dispose des documents nécessaires pour un ressortissant étranger.
L’homme se souvient de son arrivée à Charleroi, ses souvenirs lui rappellent la peur de l’inconnu. Il se souvient également de l’accueil intrigué des croyants locaux. ‘’La peur de l’inconnu est une incertitude qui est tout à fait normale. Qui sommes-nous, que veulent-ils, comment vont-ils travailler? Voilà certaines questions auxquelles nous avons été confrontés. Ensuite ils ont pu voir que ce n’était pas un gorille qui avait été envoyé mais bien un homme, un homme qui parle aussi français’’ La crainte passa donc très vite, les liens et les relations se sont créées rapidement.
Outrepasser les idées reçues
L’homme avait entendu parler de la ville mais il ne voulait pas se fier aux rumeurs. ‘’J’avais entendu que c’était une ancienne ville industrielle mais c’est tout’’. L’image d’un Charleroi un peu dur était arrivée jusqu’à Norbert. Il considère que la réputation qui lui avait été rapportée n’était pas celle qu’il a pu constater à son arrivée. ‘‘Depuis le début du chantier, il n’y a pas grand monde le soir. Avec des habitations et des bars, l’ambiance serait sans doute différente’’.
Un désengagement croissant
La messe du dimanche matin, messe pourtant traditionnelle, a perdu son public, un public relativement âgé. “Il y a de moins en moins de monde. Certaines causes expliquent ce désintérêt : les travaux, bien sur, qui rendent l’accès difficile, les changements d’itinéraires et les routes barrées qui déstabilisent les anciens. Ils n’aiment pas être bouleversés dans leurs habitudes. Ils ont l’habitude d’utiliser une route et lorsqu’ils arrivent et que le chemin est barré, ils se disent que le chemin est barré donc ne viennent plus. Je reste convaincu qu’ils vont ailleurs, là où l’accès est plus facile à la messe’’.
Une nomination pas si anodine que cela
La communauté africaine est fort présente dans Charleroi et ses alentours, la venue de Norbert répond à une requête de l’évêque afin de rassembler une communauté. ‘’L’évêque souhaitait un rayonnement religieux dont la Ville basse serait l’origine pour toucher les africains qui vivent ici’’. L’homme n’a pas uniquement été choisi pour traiter de la foi, il y a une part de social dans son quotidien. ‘’Nous aidons les premiers arrivants à s’intégrer, à obtenir leurs papiers. Nous travaillons en collaboration avec la maison africaine de Fleurus, qui dispose d’un consultant juridique’’.
Les démarches pour la régularisation ne sont pas évidentes pour les nouveaux arrivants, l’assistance offerte par l’église joue un rôle capital. L’écoute et l’attention aident grandement les demandeurs, qui trouvent d’ailleurs souvent satisfaction. Il y a également un suivi dans les démarches. ‘’Pour les africains, ceux qui viennent s’installer pour la première fois, nous allons vérifier comment cela se passe pour eux’’. Norbert différencie totalement la foi et l’aspect social que son église joue dans le paysage de la ville.
Il y a également l’assistanat aux gens de la rue mais parfois sa violence prend le pas sur l’aide et la seule solution pour Norbert est d’appeler la police. ‘’C’est un point qui nous désole. Des gens qui ont des idées reçues et qui pensent que parce que je suis noir, je ne souhaite pas les aider’’.
Une église qui retrouve déjà un peu de sa superbe, il y a eu une perte de vitesse avec les travaux mais la mixité redonne une vie à l’église. Une mixité qui rassemble un peuple européen et un peuple africain à une messe spécifique, celle du dimanche soir. ‘’Une messe aux couleurs africaines qui est devenue multiculturelle. L’accès y est plus libre car elle se déroule le dimanche soir, il y a du monde car l’accès est plus libre et cela fait de la joie de venir à cette messe’’.
Une renaissance attendue
L’espoir fait partie intégrante de la vie d’un homme de foi, Norbert ne déroge pas à cette règle. ‘’Nous comptons beaucoup sur ce chantier, quand le chantier prendra fin, il y aura beaucoup de monde. Il ne faut pas oublier que Saint-Antoine de Padoue a une vocation de passage. Les gens qui proviennent de l’aéroport, les gens qui viennent de la ville haute pour aller à la gare de Charleroi Sud passent par ici et certains rentrent dans l’église. Avant le chantier, nous avions beaucoup de passage, beaucoup de touristes qui venaient visiter l’église. Le style particulier de l’église joue un rôle primordial dans son succès. Nous avons espoir qu’à la fin du chantier, l’église connaisse un engouement nouveau. Elle va être un peu restaurée à l’intérieur car la peinture se décape, nous espérons qu’elle connaîtra une cure de jouvence avec ce chantier. Il y aura du monde, il y a de l’espoir’’.
L’église est un bâtiment imposant de style grec, le nouveau chantier ne devrait pas la cacher de la même manière que la tour Albert le faisait précédemment. “Le chantier ne va pas engloutir notre église. Les gens de passage au centre commercial feront un stop par l’église en passant. Je suis très optimiste.”