La date du 4 mai marque un tournant dans l’évolution de la ville de Charleroi. Vieux de plus de 50 ans, l’hôpital civil va être démoli pour faire place à un projet mené par le Centre public d’action sociale (CPAS). Ce dernier est devenu propriétaire d’un terrain sur lequel il compte multiplier les projets. Parmi eux, un village pour seniors.
Un symbolique passage de flambeau a eu lieu aux abords de l’ancien hôpital civil de Charleroi. Anciennement géré par l’ISPPC (Intercommunale de santé publique du Pays de Charleroi), le site est désormais propriété du CPAS (Centre publique d’aide sociale) de la ville wallonne. L’organisme social s’est vu offrir le terrain par la ville, qui lui donne pratiquement carte blanche. « Pratiquement » car ce sont bien les autorités communales et surtout son bourgmestre, Paul Magnette, qui ont le dernier mot. « Nous sommes propriétaires du terrain, créons le projet et avançons des idées mais si la Ville n’est pas d’accord, cela ne se fera pas », explique Audrey Noël, responsable communication au CPAS de Charleroi.
Cela n’a cependant pas empêché le CPAS de Charleroi de lancer un projet sur lequel il mise beaucoup. « Quand nous avons appris que l’hôpital serait abandonné, nous avons sauté sur l’occasion, affirme Audrey Noël. Avoir un terrain d’un hectare juste en face de notre bâtiment administratif était une opportunité que nous devions saisir. » Même si certains doutes subsistent, le site devrait a priori être transformé en village pour seniors. On parle d’une capacité d’accueil de 120 lits mais également d’un centre de jour. « C’est un projet qui, on l’espère, aboutira. Nous sommes propriétaires de neuf maisons de repos déjà et cela reste très demandé. Nous envisageons aussi la création de résidences-services, de bureaux et même de logements. Avec un tel espace, les opportunités sont nombreuses. » Cependant, il faudra, encore une fois, l’accord de la Ville. « Sur le plan urbanistique, la Ville a le dernier mot. Une possibilité supplémentaire serait d’y installer une crèche mais nous savons que ce n’est pas à dans les priorités du bourgmestre. Il y a donc très peu de chance que cela se concrétise. »
« Une opportunité à saisir »
Malgré ces nombreuses incertitudes, c’est en grandes pompes que le CPAS a lancé le projet. Cela commencera par la déconstruction de l’hôpital qu’entreprendront les sociétés Castagnetti et Croes et qui prendra plus ou moins un an. « En plus du désamiantage, la phase de déconstruction passera par la récupération d’au moins 90% des matériaux de l’ancien hôpital (câbles, portes, cloisons en bois) », prévient Jean-Marc Delfosse, chef de chantier pour la société de déconstruction Castagnetti. Cela devrait permettre de réduire le coût total de cette première phase estimé à un million d’euros. La deuxième phase, elle, consistera à la démolition du site.
Un manque d’organisation
Le projet mené par le CPAS en vue de démolir l’ancien hôpital civil en plein de cœur de Charleroi devrait ravir de nombreux citoyens. Cependant, certains ne semblent pas totalement convaincus par le travail réalisé par le CPAS. C’est le cas du docteur Michel Daune. Ancien membre de la direction de l’hôpital civil, il a coordonné le déménagement vers le nouvel établissement « Marie Curie » à Lodelinsart. Pour le directeur médical de l’établissement, le CPAS fait preuve d’un manque frappant d’organisation. « C’est un véritable gâchis, regrette-t-il. Le CPAS sait depuis quinze ans qu’il allait avoir ce site et il n’a toujours pas décidé ce qu’il allait en faire officiellement. Il y a eu un manque cruel d’organisation dans cette affaire. C’est d’autant plus dommage car il y a des risques que le terrain reste vide pendant plusieurs années. » D’autant plus que l’avenir du projet est loin d’être certain. On parle d’un coût total avoisinant les 200 millions d’euros. Une somme conséquente qui sera probablement trouvée via un partenariat public-privé. Il faudra cependant attendre pour l’annonce de la réalisation finale du projet. Celle-ci n’est pas attendue avant 2018, date des prochaines élections communales.
Déménagement : quelles conséquences pour le personnel ?
Si le CPAS ne connait toujours pas les infrastructures qui recouvriront le terrain libéré par la démolition de l’hôpital, celui-ci a déjà trouvé l’endroit parfait pour son nouveau bâtiment. Une zone en dehors de la ville a été sélectionnée pour accueillir le nouveau centre hospitalier. Le directeur médical de l’hôpital civil Marie Curie, Michel Daune, estime que le déménagement s’est passé à merveille. Les patients et le matériel ont tous été déplacés en un temps record.
Marilyn Favitz travaille à l’admission de l’hôpital depuis près de 40 ans. Quitter ce bâtiment du centre-ville ne fut pas de tout repos. Les souvenirs restent, la nostalgie apparaît, ses yeux pétillent.
Marilyn a été particulièrement émue par ce déménagement. Le dernier jour, tous les membres des services ont eu la chance d’écrire sur les murs. Découvrez sa réaction lorsque nous lui montrons sa signature ainsi que celles de ses collègues.
Le docteur Michel Daune a conscience qu’au début, les médecins et infirmiers souffrent du départ d’un hôpital dans lequel ils étaient habitués à vivre. Certains ne s’en remettent pas immédiatement.
Les conséquences peuvent donc aller plus loin qu’un peu de nostalgie. Il existe de réels dangers lors de déménagements, et les hôpitaux ne sont pas les seuls touchés. Les burnouts et l’absentéisme sont des fléaux qui peuvent toucher toutes les entreprises. Si celle-ci souhaite arrêter cela, elle devra trouver des solutions à l’instar du comité de pilotage à l’hôpital civil Marie Curie.
Thomas Lecloux, Pierre Galhaut, Dawid Idrissi et Charlélie Van Driessche