Samedi soir a eu lieu la sixième édition des Magritte du cinéma belge. Splendeur, tapis bleu et belgitude étaient bien sûr au rendez-vous. Mais tout cela ne serait pas possible sans l’aide des bénévoles. Depuis trois ans maintenant, je fais partie de l’équipe des volontaires qui aident l’Académie André Delvaux à la préparation et au bon déroulement de cette fête du cinéma belge. “Tu travailles pour rien ?” Oui. Parce que le cinéma belge, c’est pas Hollywood. Les millions ici, ça n’existe pas. Alors pour aider, il faut bien donner un peu de sa personne. Par amour du cinéma. Et par plaisir de pouvoir se mélanger, ne serait-ce que le temps d’une soirée, une fois par an, à la magie de cet univers que l’on ne voit que derrière un écran.
La tâche n’est souvent pas des plus agréables : préparer les cintres pour les tickets vestiaires, coller des étiquettes pour que le Prince Laurent sache qu’il doit aller s’asseoir en C13, c’est pas ce qu’il y a de plus attirant. Je vous le concède. J’attends plutôt le grand soir, pour voir arriver les “stars”, se mêler, tel un privilégié, à cette cérémonie très fermée et uniquement accessible sur invitation. Je me dis qu’au final, même si j’ai bossé dur pendant deux jours pour y avoir droit, j’ai de la chance d’y être.
Moins attrayants ? Pas moins talentueux
C’est vrai, Charlie Dupont n’est pas George Clooney et Yolande Moreau n’a pas la même renommée que Sharon Stone. Mais on s’en fout. Le talent est là, réuni au Square à Bruxelles. Le talent, le cinéma noir-jaune-rouge n’en manque pas. Il est reconnu mondialement, sauf chez nous. Le film Belgica du flamand Felix Van Groeningen a d’ailleurs récemment gagné un prix au festival américain de Sundance.
Mais ici, en Belgique francophone, quasiment personne ne le connait. Encore un paradoxe bien d’ici. Il faut le soutenir ce septième art du plat pays qui est le mien : il en a cruellement besoin. Alors, malgré la pression au sein de l’équipe, car tout doit aller comme sur des roulettes, et les moments de tension propres à l’organisation de tout événement, on sort content de l’avoir fait, content d’avoir pu contribuer au bon déroulement de cette fête, qui est la plus grosse publicité pour notre cinéma. Et ravi quand les invités nous esquissent un sourire, nous remercient, voire même papotent avec nous.
Ceci n’est pas une soirée sérieuse
La plupart des invités ne se prennent pas au sérieux, et c’est ça qui est bon. Je ne voudrais pas être bénévole aux César ou aux Oscar. Chez nous, c’est plus relax. Après avoir reçu le Magritte d’honneur, Vincent Lindon va fumer une cigarette avec une bénévole avant de retourner dans la salle de la cérémonie. C’est tout à fait normal ici. On est tous Belges (ndlr : sauf Vincent Lindon, qui est Français), on ne va pas commencer à se prendre au sérieux parce qu’il y a un tapis bleu et des caméras. Y’a qu’à voir certains passages de la cérémonie, qui sont tellement allumés qu’on se demande qui aurait bien pu imaginer ça à part le pays qui couronne un film dont le pitch situe Dieu à Bruxelles.
Déjà, rien qu’en voyant une fanfare costumée dans ce genre de cérémonie d’habitude si classique, on se dit que les mecs qui ont organisé ça sont fous. Mais ils sont touchés d’une douce folie, celle qui amène la créativité et l’imagination. Certes, il y a des exceptions, certains ne sont visiblement pas dedans, mais l’ambiance générale y est.
Une fois en bas, dans la salle prévue pour la soirée, c’est encore plus frappant. Il n’y a plus de différences : nous, bénévoles, nous mélangeons aux invités prestigieux de la cérémonie. Alors que nous sommes en train de danser, une femme vient se joindre à nous, dans notre dos. Je me retourne : Helena Noguerra, ancienne maître de cérémonie lors des deux premières éditions des Magritte ! Cela n’étonne personne. Le cuisinier se dandine lui aussi au rythme de la musique, derrière ses casseroles de pâtes et participe à la fête. On danse. On rit. On s’amuse. On mange des paquets de frites et des gaufres. On trinque. Tous ensemble. Sans chichis. Comme des Belges, une fois.