C’était à 8h du matin.
Les premiers étudiants en journalisme arrivent au compte-gouttes dans la salle de rédaction du Bruxelles Bondy Blog. Le temps s’écoule douloureusement, seuls trois rédacteurs sont autour de la table. Deux retardataires éteignent le cri accusateur de leur réveil, comme plus insistant ce matin-là. Au même moment, deux explosions retentissent à l’aéroport international de Zaventem. Il est l’heure de se réveiller. De se lever contre l’inhumanité. Il est temps de se lever pour informer, raconter, expliquer ce qui n’aurait jamais dû arriver.
C’était à 9h du matin.
Une nouvelle explosion survient dans une rame de métro à la station Maelbeek. Le fort taux d’absentéisme en salle de rédaction reflète la proportion saturée d’angoisse qui peu à peu pollue l’air de la pièce. L’air de la capitale. L’air du monde qui ne tourne pas rond. Les étudiants sont bloqués sur les quais, les bus et les métros ne circulent plus. Nos reporters du Bruxelles Bondy Blog sont bloqués géographiquement. Et émotionnellement. Mais journalistiquement, les étudiants ne s’arrêtent pas.
C’était à 10h du matin.
Les auditoires de notre école sont évacués, les rédacteurs résistent au cœur du bâtiment central. La rédactrice en chef cherche une radio mais ne trouve aucun transistor. On essaye d’écouter La Première en ligne mais le flux émis par le site est interrompu. Le réseau mobile est saturé, lui aussi. Les réseaux sociaux prennent le relais, la rédaction se concerte pour publier les informations qui tombent comme des bombes. Le bilan est de 13 morts à Zaventem, 15 à Maelbeek.
C’était à 11h du matin.
Deux autres de nos reporters, Tatyana et Alice, se rendent sur place à Zaventem et vivent les évènements en direct. Elles assistent à l’évacuation de l’aéroport et suivent les personnes en direction du centre du village de Zaventem. Tatyana et Alice rencontrent ces gens en transit. Ils errent à Zaventem d’un air déconnecté, sous le choc. Elles attendent avec eux, les accompagnent jusqu’au hall des sports où ils sont redirigés par mesure de sécurité.
C’était à 16h de l’après-midi.
Deux autres rédacteurs, Simon et Mathilde, partent en reportage dans le quartier de la Bourse, où une forte mobilisation citoyenne dessine à la craie son soutien aux attentats sur le Boulevard Anspach. Les câlins gratuits, l’odeur des fleurs éparpillées sur le trottoir, l’empathie échangée entre citoyens inconnus redonnent quelques couleurs à la capitale morne, froide et endormie.
C’était un mardi, le 22 mars 2016.
Face à l’horreur, nous sommes tous debout.