Des jeunes grecs et allemands s’interrogent : une solution éthique ?
Le sujet du remboursement de la dette allemande envers la Grèce ne pose pas seulement des questions juridiques et économiques, mais aussi et surtout morales. Nous avons mené six interviews afin de tester l’opinion de jeunes. Deux Grecs, un Chypriote et trois Allemands nous ont ainsi parlé en toute liberté. Nous leur avons posé la question : après 70 ans, est-il encore légitime de demander à l’Allemagne de rembourser tout ou une partie de sa dette ?
Ionna Dervisi, une étudiante grecque, n’approuve pas l’idée d’un remboursement. « Je ne pense pas que ce serait éthique qu’un jeune Grec demande à un Allemand du même âge de payer pour les erreurs du passé qui n’ont pas de place dans l’Allemagne d’aujourd’hui ! ». Arndt Münch, étudiant allemand en économie, considère lui aussi que ce serait injuste de demander à la génération des contribuables actuels de payer la dette de guerre de leurs ancêtres. Pour tous deux, les Allemands d’aujourd’hui n’ont plus rien à voir avec les atrocités commises par le troisième Reich.
Benjamin Welge, un jeune Allemand, diplômé en ingénieur de gestion, et Arndt trouvent qu’on ne peut pas tout mélanger. Arndt souligne que la dette grecque est une dette souveraine et récente, qui a été accumulée par des gouvernements démocratiquement élus alors que la dette allemande a été accumulée par le troisième Reich, un régime totalitaire, dont ses contemporains sont morts depuis longtemps. Benjamin et Arndt se disent cependant favorables à une diminution voire une annulation de la dette grecque. Selon Benjamin : « la Grèce fait partie de la zone euro, elle est un pays européen et ce serait l’occasion pour l’Union européenne de se montrer solidaire envers un de ses membres en difficulté. En faisant ce geste, elle se montrerait forte et unie. »
Donner une chance à la Grèce
Grâce Cattermole, une étudiante en architecture d’origine grecque et anglaise, défend un point de vue radicalement opposé. Elle considère qu’il est complètement légitime de demander à l’Allemagne de rembourser ce qu’elle doit « car une dette restera toujours une dette et le temps ne change ou ne devrait rien changer à cela ».
Pour Max Doeckel, jeune journaliste allemand, cette discussion lui rappelle les fêtes d’anniversaire de son enfance. « Si Paul m’invitait à sa fête d’anniversaire, en retour je l’invitais à ma fête d’anniversaire. Par contre, la présence de Paul à ma fête d’anniversaire ne rendait pas celle-ci forcément meilleure. » Selon Max, on ne peut pas appliquer cette même politique de donnant-donnant à la dette grecque. « Elle devrait être réduite ou annulée si c’est une solution pour la Grèce et pour l’Europe et non selon la loi du talion. »
Finalement, de nombreux jeunes souhaiteraient qu’on donne une chance au peuple grec. C’est notamment le message d’ Orestis Votsis, un jeune chypriote, qui exprime, à notre micro, ses vœux pour les semaines à venir : « Si nous croyons en l’Union européenne et en tout ce qu’elle représente : égalité et coopération, les deux valeurs principales sur lesquelles cette institution a été construite, alors on devrait maintenant donner une chance à la Grèce. L’Allemagne et sa chancelière Mme Merkel, devrait coopérer avec le nouveau premier ministre grec et le faire d’une manière non négative. »
Orestis Votsis, jeune chypriote
