Le nombre de festivals en Belgique ne cesse d’augmenter. Les organisations, qu’elles soient privées ou publiques, naissent aux quatre coins du pays. Focus sur les raisons qui favorisent le développement de ces festivals.
par Rémi LACH - Maxime DEFAYS - Thomas LELOUP
Manque à gagner
Concurrence
Monopole
Mot d'ordre
Combler le manque à gagner
Le monde de la musique a depuis toujours constitué un marché très juteux. Les maisons de disques et leurs artistes, via la vente de produits tels que des albums, ont contribué à faire grossir les caisses de l’industrie musicale.
Depuis des années, la chute des ventes, liée à la dématérialisation de la musique, a obligé le monde musical à revoir ses copies quant à ses stratégies. Et ce n’est pas la hausse des ventes qu’a connue le disque vinyle (+ 32% en 2013 aux USA tout de même) qui parviendra, à elle seule, à combler le manque à gagner. Si des artistes ne vendent plus d’albums, il faut bien compenser par autre chose : les tournées. Et la demande est là. De plus en plus.
Une concurrence accrue
Les festivals et les concerts fleurissent de plus en plus dans le paysage musical mondial. Il n’y a jamais eu autant d’événements organisés que ces dernières années. Par exemple, en Belgique, selon les derniers chiffres datant de 2012, on recensait plus de 600 festivals, soit cinquante de plus que l’année précédente.
Dans ce total sont compris tant les énormes cylindrées telles que Werchter, Tomorrowland ou encore le festival de Dour, que les petits festivals à initiative privée (lancés par des amis ou des mouvements de jeunesse notamment), sans oublier les festivals organisés par les administrations publiques comme les villes. On peut citer entre autres les Francofolies de Spa, le Bel’Zik Festival à Herve ou bien le Verdur Rock à Namur.
Loïc Van Gompel, organisateur du Belgium Rocks Festival à Liège nous explique, selon lui, pourquoi nous assistons à un tel boom depuis quelques années :
Marc Radelet, attaché de presse des Francofolies de Spa, confirme les dires de Loïc Van Gompel. Selon lui, depuis le début des années 2000 et la chute de l’industrie du disque, le côté « live » est devenu terriblement important pour les artistes et leurs producteurs, d’où l’augmentation des cachets demandés. Il évoque le paradoxe actuel et ses difficultés en tant qu’organisateur de festival.
Un monopole américain
Les festivals flamands attirent chaque année des têtes d’affiches largement supérieures aux festivals organisés en Wallonie et à Bruxelles. C’est surtout grâce à Live Nation, une branche de la multinationale Clear Channel Communication (devenue désormais IHeart Media). Il faut savoir que cette entreprise californienne a racheté les droits à Herman Schuermans, l’homme fort du festival Rock Werchter en 2001.
La multinationale subit régulièrement des critiques par rapport au monopole qu’elle exerce, notamment car elle organise la majorité des concerts, spectacles et festivals dans le monde. Live Nation n’est d’ailleurs pas bien loin de l’organisation des méga-events internationaux Tomorrowland. La société américaine chapeaute une énorme partie des concerts et des événements musicaux en Belgique et à l’étranger.
Elle place dès lors des artistes dans plusieurs de ses festivals sous forme de « tournée ». Par exemple, cette année, on peut retrouver le groupe britannique Muse dans de nombreux festivals qui appartiennent à l’entreprise américaine et non des moindres comme « Werchter », le « Mainsquare » à Arras, le « Pinkpop » aux Pays-Bas ou encore le « Download Festival » en Angleterre.
Le secteur musical n’échappe pas non plus aux économies d’échelle. On remarque qu’ils font généralement tourner les mêmes artistes dans leurs festivals, comme évoqué ci-dessus. Les chances pour les petits groupes d’obtenir une place dans un festival prestigieux sont dès lors de plus en plus minces. L’emprise des grands groupes de médias tend à casser l’éclectisme des artistes. Les festivals de moindre importance deviennent alors des alternatives obligatoires pour que les « petits » groupes puissent s’exprimer.
Le mot d'ordre : diversification
Justement, parlons-en de ces « petits » événements. On pourrait penser que les grosses écuries cassent toute concurrence puisqu’elles détiennent le monopole financier et artistique, mais paradoxalement il n’y a jamais eu autant de festivals d’initiatives plus « modestes », organisés notamment soit par des petites communes, désireuses de s’offrir une renommée et une visibilité externes, soit par des groupes d’amis, des mouvements de jeunesse ou encore par des ASBL diverses.
C’est le cas du « Belgium Rocks Festival », un petit événement organisé dans la région liégeoise par l’ASBL « Belgium Rocks Music ». Celle-ci s’articule autour de quelques membres, amis dans la vie et amoureux de la musique belge.
Pour Loïc Van Gompel, un des organisateurs de l’événement, la volonté était d’offrir une alternative aux gros festivals : proposer à l’affiche des talents uniquement régionaux voire locaux. Un maître mot : la diversification. L’important, c’est de ne pas de reproduire les mêmes programmes que proposent leurs homologues.
La motivation des organisateurs du Chiefmeeting Festival, petit festival local à Chièvres qui a perduré pendant 4 ans, était semblable : créer une formule différente des autres événements musicaux. L’idée était un mélange de groupes « tributes » (ce sont des formations reprenant les chansons de groupes mythiques) et de groupes de Metal. " Il s’agissait d’attirer les spectateurs avec des formations reprenant les compositions de Queen, Slade ou encore AC/DC et de leur faire découvrir un style moins connu du grand public, le Metal progressif. De plus, nous agrémentions ce festival d’une balade à moto », nous confie Jessica Odent, co-organisatrice de l’événement. Encore une fois, le maître mot est la « diversification » : créer une formule différente et répondre à la demande.
Comme cité précédemment, les administrations publiques organisent, elles aussi, leurs propres événements. Ainsi, à Chièvres (province du Hainaut), le bourgmestre a mis en place un festival dont l’objectif est de valoriser la visibilité de la Ville. Le choix d’une programmation électro s’est fait naturellement pour répondre à la demande.
Nous avons contacté le bourgmestre de Chièvres par téléphone durant son trajet en voiture. Ce qui explique la mauvaise qualité audio.
Pour Bruno Lefebvre, organiser un tel événement est très compliqué. Cependant, l'augmentation de l’offre en terme de festivals est un point positif pour la Belgique.
L’augmentation des prix et du nombre de festivals ne pourra que ravir, d’une part les groupes qui trouveront de plus en plus de lieux où se produire et d’autre part les festivaliers en quête de nouvelles sorties.