Costas Lapavitsas est économiste et ancien parlementaire du parti Syriza, la gauche radicale, en Grèce. Après l’accord passé entre le gouvernement grec et ses créanciers européens, le député abandonne son poste et crée, avec 24 autres compères, le parti de l’Union populaire. Dans le cadre de la conférence « Europe : les alternatives à la grande régression » organisée par Econosphères à l’IHECS, Costas Lapavitsas partage ses idées sur la sortie de la Grèce de la zone euro.
Alexis Tsipras a affirmé éviter un désastre à la Grèce en signant le troisième mémorandum en juillet 2015. Un accord qui ne réduit en rien les problèmes de dette du pays. N’avait-il vraiment pas le choix ?
Il avait le choix mais ce choix implique des étapes radicales, des décisions radicales et des mesures décisives qui pourraient changer la balance du pouvoir en Grèce et ses relations avec les autres pays européens. C’est le radicalisme que Syriza n’a pas. Tsipras accepte tout ce qu’on lui impose car il ne veut pas sortir de l’Union européenne.
Son gouvernement fait les mêmes erreurs que le précédent. Ils ne sont pas parvenus à restructurer la dette, à sortir de l’austérité et à protéger le peuple. À la place, ils acceptent un accord récessif et inégalitaire. Les Grecs ont très clairement dit lors du referendum qu’ils ne veulent pas des plans de sauvetage imposés par l’Europe.
Après la capitulation du gouvernement grec, vous avez quitté Syriza. Que proposez-vous pour sauver la Grèce aujourd’hui ?
La seule chose à faire aujourd’hui est de quitter la zone euro. Elle ne fonctionne pas. L’Union européenne n’est pas prête, dans son système actuel, à aider la Grèce. Le pays est dans un besoin urgent de politiques alternatives. Or, l’expérience des six dernières années, particulièrement depuis la réélection de Syriza, a montré l’impossibilité de mettre en place des politiques dans l’intérêt du peuple, au sein de l’actuelle zone euro. Pour la Grèce, quitter l’union monétaire, c’est pouvoir implanter des politiques en faveur des travailleurs, quitter l’austérité et redistribuer autrement les richesses.
Comment organiser cette sortie de l’euro ?
Selon moi, l’Union européenne devrait prendre des mesures pour faciliter la sortie du pays, dans l’intérêt de tous, en organisant des liquidités pour les banques, des fournitures de première nécessité comme l’énergie, les médicaments, la nourriture. La Banque centrale européenne devrait également protéger le taux de change entre la devise nationale et l’euro. Dans la situation actuelle, je doute hélas que ces mesures d’accompagnement soient effectivement mises en œuvre.
La sortie de la Grèce de la zone euro pourrait-elle produire un effet boule de neige dans le reste de l’Union ?
Des pays comme le Portugal ou l’Italie ont besoin de considérer sérieusement leur sortie de l’eurozone. Ils ne peuvent plus survivre dans ce système. Ils ne vont probablement plus avoir de croissance. Le plan de sortie de la Grèce pourrait amener des discussions et constituer un modèle intéressant pour eux. Enfin, ce plan pourrait aussi initier, au sein des pays du nord, une réflexion sur les réformes nécessaires de l’union monétaire.