18 place Flagey, Bruxelles. Café Belga, Paolo Pelizzari assis au milieu parmi les tables au bois verni, la baie vitrée éclaire les clients. Ce photographe d’Art et enseignant à la Cambre, habitant Lasne, a déposé la marque “Molenbeek” à La Haye le 25 novembre dernier, peu après les attentats de Paris où l’image de Molenbeek a été secouée à jamais. Un quartier qui, pour Paolo Pelizzari, a une grande notoriété. Il ne peut s’empêcher de faire le parallèle avec Harlem qui, « à un moment, était décrié et qui est devenu par la suite un quartier hyper branché. Moi, je ne serais pas du tout étonné, quand je vois la biodiversité de ce quartier, moi je crois que derrière ce nom il y a un vrai potentiel. Ça c’est une chose. L’autre chose, c’est que je trouve assez rigolo l’idée de prendre des boissons qui représentent une ligne de fracture entre les dogmes. Faire des sodas et faire de la bière, ça oblige à avoir une attitude tolérante et c’est le contraire de la provocation. »
« Mettre la liberté en musique »
Par rapport à tout le raffut médiatique qu’a pu provoquer la création de cette marque Molenbeek, Paolo Pelizzari garde la tête sur les épaules. « J’ai refusé d’aller dans des médias qui allaient plutôt dans le côté polémique, plutôt que de s’amuser, et j’espère que cette bière existera, qu’elle créera quelques bénéfices avec lesquels on pourra un faire un concert, le but n’étant pas du tout de faire de l’argent ». Il poursuit : « Il y a un premier refus, mais on va faire appel, il y a des façons de réagir ». Malgré ce refus, et même si son projet n’aboutit, Paolo Melazziri se satisfait déjà de tout ce que la déposition de cette marque a pu créer, les débats : « J’adore l’énergie que ça me donne. »
Paolo Pelizzari place son initiative sous le signe de la liberté, lui qui revient d’Iran, lui qui souffrait « de cette chape qu’il y avait ». Il bénit le ciel, même s’il ne croit pas en dieu. « Depuis le début de cette histoire, on est en train de jouer de la musique avec la liberté. » Et Paolo Pelizzari de nous livrer sa vision du monde qui, pour lui, « est une sorte de grand barnum où il y a des clowns, des jongleurs, des illusionnistes. Il y a de tout et je me considère comme spectateur et souffleur à la fois. »
Une formule originale qu’il explicite après un petit moment de silence, un petit regard par la baie vitrée où l’on voit défiler le ballet quotidien de la place Flagey, ses tramways et ses touristes. « C’est que je me vois comme spectateur parce que j’observe sans trop juger, que je prends parti pour la liberté, souffleur parce qu’à partir du moment où je produis cette marque j’insuffle. » Même si la bourgmestre ne voyait pas d’un très bon œil cette initiative. Le photographe se dit « prêt à collaborer avec la commune, tout est surprise, tout est créativité ».
« Le but n’est pas du tout économique »
La mine de Paolo Melazziri s’assombrit un peu. Il répond à tous ceux qui l’accusent de vouloir s’enrichir, qu’il ne s’agit pas du tout de cela. « Le but n’est pas du tout économique, l’argent servira essentiellement à financer des initiatives culturelles. » Il donne l’exemple d’un réalisateur qui « est en train de faire un film sur Molenbeek. Il va le présenter dans la commune et j’imagine que ce jour-là, on aura de la bière Molenbeek. »
Ahmed Slama