Marie-Catherine Beuth : “Pour faire bouger les choses, il faut être entreprenant”

Marie-Catherine Beuth est bien placée pour parler de l’innovation dans les médias. Auteure de l’application NOD (News on Demand), sortie aux États-Unis fin 2014, et journaliste au quotidien français, Le Figaro, elle se questionne sur l’utilisation des nouvelles technologies dans le journalisme.

En 2013, la jeune française s’envole vers l’Amérique, à Stanford où se rejoignent une vingtaine de journalistes du monde entier, dans le cadre du Knight Fellowship. Ce programme intervient pour réfléchir à une stratégie concernant la création au sein des médias. Elle fut correspondante pour Le Figaro dans la Sillicon Valley. Après cette expérience, elle revient à la case départ, son pays d’origine, afin de participer à une nouvelle aventure, en devenant responsable éditoriale du site d’information économique, Business Insider France, déjà connu aux États-Unis.

Le journalisme revêtit un côté entrepreneurial

“Pour faire bouger les choses, il faut être entreprenant, par exemple en créant sa propre start-up média. L’argent est important pour les journalistes parce qu’on a décidé de rapporter l’information et c’est hyper important que cette information-là atteigne des gens et pour ça il faut de l’argent. Vendre notre sujet est tout à fait naturel en tant que journaliste.” décrit-elle.

“Si on fait des super papiers et qu’il n’y a pas de lecteurs, s’il n’y a plus de moyens de faire ces papiers, ils n’existeront plus, on aura failli à notre mission en tant que journaliste.”

Chaque papier est une mini start-up. Il faut se créer son propre job.

“Il faut donc ajouter un petit plus aux productions journalistiques”, précise la journaliste.

“C’est une catégorie d’entrepreneurs dans le monde des médias qui peuvent dédier leur énergie à faire ça et pour permettre à d’autres journalistes, dont ce n’est pas la nature ou la compétence, de travailler sur cette problématique-là.”

“Il faut toujours penser à l’utilisateur”

“Pour une collecte de fonds, la première chose à laquelle il faut toujours penser est l’utilisateur. Il faut tester des idées, des prototypes. Un exemple qui m’a fait faire beaucoup de progrès : pour faire NOD, j’ai dessiné sur des petites fiches Bristol les différents écrans que je voulais avoir dans mon appli et je suis allée voir des gens qui prenaient le métro […], juste aller voir des gens, en leur demandant “Est-ce que tu peux regarder mon appli et la tester“. Les commentaires étaient d’une richesse sans nom.

La deuxième chose à avoir en tête est que l’on fait un pitch devant potentiellement 200.000 personnes qui pourraient chacune vous donner un petit peu de sous. Il faut raconter une histoire. […] Les histoires qui marchent le mieux sont les histoires qui parlent de vous. […] Quand je vais voir votre vidéo pour comprendre pourquoi vous cherchez de l’argent, j’ai envie de savoir pourquoi vous faites ce projet-là, qui vous êtes, où vous voulez aller , qu’est-ce que vous voulez faire et qu’on me raconte vraiment en me parlant de vous, de chacun.

C’est comme quand on fait un article, on va enquêter sur la crise des Uber à Paris : on va interviewer des gens de Uber, on va interroger des gens qui conduisent les taxis, on va interroger des passagers. Raconter ce qu’on fait dans une campagne de crowdfunding, c’est à peu près la même chose.”

“Business Insider, c’est comme Instagram”

“On va sortir bientôt Business Insider en France. C’est un site que je lis depuis des années, qui est assez gros aux États-Unis. J’aime bien utiliser cette image pour expliquer le concept éditorial de “BI”. Aujourd’hui, l’information économique va être très bien traitée par les supports comme Les Echos. Pour moi, c’est un peu comme Flickr, c’est une appli pour ranger, classer ses photos. C’est très utilite… mais il manque pour moi une raison d’y aller tous les jours, de trouver des trucs hyper cools. Comparé à Flickr, il y a une appli type Instagram où on rajoute des petits filtres qui donnent des couleurs, un contexte à une photo […] il y a un cachet particulier. Business Insider, c’est Instagram. Ça marche très bien comme ça aux États-Unis et donc mon job est que ça marche aussi en France”, conclut la journaliste.