Ancrées dans la culture marocaine, les traditions du hammam se perpétuent à Bruxelles. Ses rites et ses secrets se reproduisent tout naturellement au sein de la capitale Belge, où Zehour Kharbouch a décidé d’ouvrir son établissement, il y a 11 ans. Besoin personnel à l’origine, ce hammam faisait depuis longtemps l’objet d’une demande soutenue de la part des femmes du voisinage. « Il n’y avait pas de hammam qui répondait à mes critères à Bruxelles. Je n’y trouvais pas mon compte », avoue-t-elle. Elle fonde alors le Riad avec l’aide de son fils. L’idée : créer un lieu authentique mais luxueux, à la frontière entre tradition marocaine et modernité belge.
Le jeudi pendant la journée, l’espace est réservé exclusivement aux femmes. Au moment de franchir les portes ciselées du hammam, des effluves d’encens et de jasmin exhalent l’odorat du visiteur. À l’intérieur, un espace tamisé laisse entrevoir de larges divans moelleux. Il est encore tôt, les clientes sont rares. La voix avenante de Madame Kharbouch brise la quiétude du lieu encore endormi : « Bonjour, soyez les bienvenues ! » Cette marocaine quinquagénaire, portant une jellaba et un turban rouge sur sa tête, accorde un accueil chaleureux à ses clientes. Les nouvelles usagères sont invitées à s’installer dans le salon pour siroter un verre de thé à la menthe accompagné de crêpes marocaines “msemen” au miel.
Gommages, massages et soins esthétiques composent entre autres l’éventail des soins proposés. Disposés sur un comptoir, des pots remplis d’argile, de henné, de lavande et de boutons de rose séchés serviront à préparer des masques pour le visage et les cheveux. Débarrassée de ses vêtements, la cliente ne laisse sur elle que sa culotte et se couvre le corps d’un tissu aux couleurs vives. Elle met alors le cap vers les bains embaumés au sous-sol, dotée de ses sandales en plastique et de son petit pot de savon noir. À l’intérieur de cet espace embrumé, tout un rituel se construit.
Avant de livrer son corps aux mains de la gommeuse tayyaba, l’étape du savon noir est inévitable. Un tour dans la salle de vapeur ardente permet de relâcher totalement son corps et son esprit. En sous-vêtements, les gommeuses se mettent debout à côté des tables de gommage en marbre. Les gommeuses frictionnent les corps au gant de crin avec énergie pour libérer leurs pores des toxines qui les étouffent. Une peau propre et douce, telle est la mission de la gommeuse qui laisse par la suite sa cliente s’occuper de sa crinière, etc… Tous les rites du hammam “beldi” (traditionnel) marocain se passent dans cette ambiance particulière.
Ceux qui s’y rendent pour la première fois sont étonnés de voir à quel point les cultures s’y croisent : des Bruxellois de tous horizons se sont appropriés ce lieu de détente cosmopolite. Chez Riad, le hammam est une activité festive qui procure l’allégresse la plus fine. Les femmes y vont pour se retrouver entre amies ou pour des occasions telles qu’un anniversaire, le bain de la mariée ou les rituels de maternité, dans le respect des traditions. «Le Riad vous ramène au Maroc comme par magie», s’enthousiasme Fadila, une jeune cliente marocaine fidèle au hammam de Zehour.
Cependant certains usages se sont perdus : les Marocaines sont habituées à s’y rendre par exemple une fois par semaine ou par mois, tandis que les Bruxelloises n’y vont qu’occasionnellement.
Safaa Aoukacha et Imane Lachhab
Bienvenue chez les Maroxellois
Neuf étudiants marocains de l’ISIC (l’Institut supérieur de l’information et de la communication) et deux de leurs professeurs ont investi la rédaction du Bruxelles Bondy Blog. Notre thème de la semaine sera “Bienvenue chez les Maroxellois”, une façon de qualifier notre échange inter-culturel, mais aussi un clin d’œil à une expression qu’utilisent certains Bruxellois d’origine marocaine en référence à leurs identités plurielles.