Après une campagne de régularisation du gouvernement belge, plus de 1.880 dossiers de demandes de régularisation ont été introduits dans la commune de Molenbeek. Que faire de tous étrangers devenus Belges et qui ne maîtrisent ni la langue ni l’histoire du pays ? Se crée alors sous l’impulsion des pouvoirs publics l’asbl Sampa, dont l’objectif est de lutter contre l’exclusion sociale et de promouvoir l’insertion. Pour ce faire, elle a instauré différentes formes d’accompagnement comme des cours de citoyenneté, d’alphabétisation et une aide juridique et psychologique.
Catherine de Meyer, directrice de Sampa, rappelle que beaucoup de personnes ont connu l’exil. « Il y avait des gens venant du Kosovo qui avaient vécu des traumatismes, il fallait s’occuper d’eux. » Par ailleurs, certains Molenbeekois d’origine étrangère ont commencé à sortir de l’ombre et à revendiquer leurs droits. Le Sampa, qui était à l’origine un service généraliste, s’est peu à peu transformé en service spécialisé en droits des étrangers. Du jour au lendemain, ceux qui avaient des papiers voulaient faire un regroupement familial, d’autres voulaient obtenir des visas touristiques pour leurs parents.
Cours de Français et histoire de la Belgique
Arriver dans un pays que l’on ne connaît pas pour fuir des conflits armés ou avoir une vie meilleure pose quelques problèmes. Ce cours dispensé par l’association a donc pour objectif de donner des clés de compréhension du fonctionnement des institutions et d’aborder l’histoire de la Belgique. Pour accéder à cet enseignement, étalé sur une soixantaine d’heures, les participants doivent être alphabétisés et comprendre le Français.
Lilit est Arménienne et vit en Belgique depuis un an. « Je suis venue volontairement aux cours car pour moi c’est important de faire le premier pas. En plus, j’adore le Français », explique la jeune femme, sourire aux lèvres. Elle suit les cours d’alphabétisation depuis le mois de décembre mais espère déjà passer au niveau supérieur. D’ailleurs, elle donne son maximum pour y arriver et fait l’effort de parler dans la langue de Molière lorsqu’elle va faire ses courses, lire des articles ou encore expliquer le chemin à un touriste. « J’ai même téléchargé une application pour m’exercer, j’éprouve encore des difficultés avec l’orthographe. »
Alimata* a plus de mal avec l’écriture et prend l’initiative de venir deux fois par jour. « C’est dur ! » confie-t-elle timidement. Âgée d’une quarantaine d’années, cette maman de six enfants originaire de Guinée-Conakry vient ici régulièrement pour apprendre à lire et à écrire. N’ayant jamais été scolarisée, la tâche est d’autant plus difficile que cette Guinéenne n’est jamais allée à l’école. « Ici nous avons des personnes, analphabètes, qui n’ont jamais été scolarisées, et des personnes qui sont devenues illettrées. Ils ont tous un niveau différent et selon leur évolution, on les change de classe car certains avancent plus vite que d’autres », confie Patrick, leur professeur de Français langue étrangère (FLE).
Armé de patience et d’humour, Patrick, un ancien historien devenu enseignant au sein de l’association, explique ses motivations : « Je voulais donner un nouveau tournant à ma carrière, faire autre chose […] Je ne me pose plus de questions sur mon métier, c’est vraiment ce que je voulais faire. Je ne réfléchis plus à des problèmes, je les règle. » Et quand on lui demande si aider les autres donne un sens à son travail, il répond : « Non, c’est ce travail qui donne un sens à ma vie. »
Margaux Schild et Sabrina Mondélice