Le jour de la manifestation du 6 novembre, Lionel, 25 ans, de la zone de police Uccle-Watermael-Auderghem, était désigné en renfort. « Généralement, ce poste consiste à tenir les barrières, canaliser les gens, les aiguiller. » Quand ça se passe bien, ils sont à leur poste à discuter entre collègues. Mais lors de la manifestation nationale qui a rassemblé plus de 100 000 personnes dans les rues de Bruxelles, ce fut différent.
Ce jour-là, une centaine de policiers ont été blessés.
Lorsque son peloton a été appelé en renfort, les policiers déjà sur place appelaient à l’aide. Ils étaient encerclés. Il était 14 heures, aux alentours de la rue Fonsny et de la Porte de Hal. Ils ont alors tous sauté dans les camionnettes, distribué le matériel et les protections. « On a directement couru les aider. Moi, je n’ai pas eu le temps de mettre tout le matériel. On devait vraiment faire vite. » Ensemble, ils ont alors repris un peu confiance, et ont su gérer les manifestants, encore relativement calmes. Mais très vite, la situation s’est inversée. Les manifestants ont repris du poil de la bête et les policiers ont été obligés de reculer. « A la fin, ça devenait vraiment très violent et agressif. Je suis d’ailleurs tombé deux fois. Je me suis alors relevé et j’ai reçu un pavé dans le dos. »
Sous les pavés
Une pluie de pavés. Lionel ne les a pas comptés, mais parle de plus d’une centaine de pavés qui arrivaient de partout. « Un pavé a troué mon casque. C’est ce qui a provoqué ma commotion cérébrale. J’en ai reçu dans les jambes et maintenant je ne sais plus marcher sans boiter. Ça fait 10 jours d’arrêt maladie. Tout ça pour avoir fait mon boulot… »
Lionel a passé la nuit aux urgences. « Pour ma famille, c’était la panique à bord. Ma maman ne savait pas que je travaillais sur la manifestation, mais quand j’ai récupéré mon téléphone une fois à l’hôpital, j’avais une dizaine d’appels en absence et le double de SMS. »
Et pourtant, comme tous les autres citoyens, Lionel a aussi des revendications. Il refuse d’ailleurs de mettre tous les manifestants dans le même sac. « Manifester, c’est un droit démocratique. Il faut aussi faire la distinction entre la manifestation qui s’est très bien déroulée et l’émeute qui en a découlé. Les gens en face de nous étaient là pour casser. Je n’ai entendu aucun slogan ni revendication lors des émeutes. Ils voulaient simplement ‘casser du flic’. »