Sylvain Bourdos (CC BY NC SA)
11
Avr
2016

Julienske, plus connu sous le nom de Manneken-Pis, symbole arroseur de la lutte contre le terrorisme.

Manneken-Pis. Photo : Sylvain Bourdos (CC BY NC SA)

Julienske, plus connu sous le nom de Manneken-Pis, symbole arroseur de la lutte contre le terrorisme.

11 Avr
2016

Manneken-Pis : portrait du plus vieux ket de Bruxelles

Dans les dessins et les hommages qui ont fleuri sur la toile suite aux attentats de Bruxelles, notre Manneken-Pis national clame haut et fort qu’il ira « pisser sur vos bombes ». En plus de représenter notre capitale, le petit homme s’érige en symbole de la lutte contre le terrorisme. Et pourtant, on aurait pu le croire à la solde de Daesh : jusqu’il y a peu, lorsque l’on entrait les mots-clés « état islamique » dans la version belge de Google Maps, le site cartographiait la position que le petit homme occupe tous les jours.

Plus petit qu’on ne pourrait le penser, il garde néanmoins la tête haute en ces temps enclins à la paranoïa. Il rappelle à qui veut l’entendre qu’il a été kidnappé plusieurs fois, mais qu’il n’a jamais blâmé Daesh pour cela.

Le petit sauveur de Bruxelles

Il faut dire qu’il en a vu des vertes et des pas mûres ! Sous ses traits poupins et ses formes rondes, on ne croirait presque pas les innombrables histoires qui circulent à son sujet. Avec l’âge, il se pourrait qu’il mélange son vécu avec de nombreuses rumeurs. Néanmoins, il pourrait raconter une de ses légendes en ces mots :

« Quansque j’étais encore un ketje, Bruxelles a été assiégée pendant longtemps. Et on pensait que les assaillants avaient fini par partir. Du coup, on a fait la fête ! Mon bompa m’avait acheté un paquet de caricoles, c’était tof. J’me promenais et là, j’vois une mèche, pas une krol hein, mais une mèche de poudre noire qui filait. Je me dis : ‘Maar vent toch, faut arrêter ça !’. Mais pas d’eau, pas de drache qui s’annonçait non plus. Du coup, j’ai fait un plaske* ».

C’est ainsi qu’aurait débuté une notoriété d’arroseur qui n’est plus à démontrer aujourd’hui. Il rajoute que, par la suite, une quantité non négligeable d’explosifs a été découverte dans les égouts de la ville, à l’autre bout de la mèche humide. Bruxelles n’était donc pas passée loin d’une catastrophe.

Une garde-robe bien fournie

Quitte à venir en aide à sa ville, Julien le fait avec classe. Actuellement, il aurait plus de 900 ensembles à revêtir, selon les occasions : Diable rouge, Gilles de Binche, cosmonaute ou encore guindailleur estudiantin ; ses tenues intriguent presque autant les touristes que sa propre figure historique.

Il raconte avec sourire espiègle que ses premières parures lui ont été offertes par des rois, impressionnés par son si jeune courage. Il est rapidement devenu un symbole de bravoure et de folklore à la belge. Il faut effectivement beaucoup d’audace pour représenter la capitale européenne avec un manneke urinant.

« Alleï, imaginez quand même que je représente Bruxelles, moi, le peï qui pisse… »

Si ces derniers temps les touristes se font plus rares, il confie qu’il côtoie habituellement beaucoup d’asiatiques, au cœur de Bruxelles. D’ailleurs, il ne s’ennuie jamais et reçoit, à toutes heures, des visiteurs venus des quatre coins du monde. Une renommée à laquelle il s’est habitué. Il pense que les touristes font tous leur dikkenek en rentrant au pays car ils ont vu ‘le tich le plus connu de Belgique’.

Un bruxellois comme les autres

S’il consacre son temps à représenter la ville, Julien fait également partie de la vie culturelle. Il participe à tout événement notoire, du Meyboom à la Saint-V. On le voit souvent arpenter les musées. Une des pièces de la Maison du Roi accueille d’ailleurs une partie de ses tenues. Il trouve sûrement cela un peu prétentieux, mais ne fait que lever les yeux au ciel quand on le mentionne.

Chaque dimanche midi, après le marché aux puces, il retrouve sa femme Jeanne (Jeanneke pour les intimes) pour un brunch. Il faut bien vivre avec son temps ! Elle raconte toujours s’amuser avec lui, bien qu’il soit un sacré zivereir : « Il fait parfois un peu de son stoef, mais jamais longtemps, sinon je lui dis foert* ».

Bien qu’à nos yeux il garde ses traits ronds et malicieux, le Julien n’en prend pas moins de l’âge – plus de 400 ans tout de même – et ce n’est pas la vieillesse qui l’aide à garder toutes ses frites dans le même sachet !

 

* Petit lexique de Brusseleir 

Maar vent toch : M’enfin

Faire un plaske : uriner

Faire son dikkenek / de son stoef : se vanter

Zivereir : Radoteur

Foert : Zut

Odile Vanhellemont (Bac2) 

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