Je m’appelle Noé Boever, je suis belge et il ne suffit que de quelques mots pour que mon accent brrruxellois me trahisse. Je suis né en Belgique il y a 25 ans de parents belges eux-mêmes nés en Belgique. Enfin, presque…
Grâce au droit du sang (ou à cause de celui-ci, j’ai encore du mal à trancher), j’ai automatiquement obtenu la nationalité française lorsque mon cher père, français par sa française de mère, m’a déclaré à l’Etat français.
Me voilà donc, belge né en Belgique de parents belges, détenteur de la nationalité de Victor Hugo, Napoléon Bonaparte, Zinédine Zidane et de Booba (chacun ses références).
Alors à première vue, une deuxième carte d’identité gratuite, pourquoi pas, je prends, mais quand Marine Le Pen explique que le droit du sol est illégitime car la nationalité française doit se mériter, j’avoue avoir du mal à suivre.
Le droit du sol remis en cause
Il existe deux manières d’obtenir une nationalité : le droit du sol et le droit du sang. En France, les deux droits coexistent.
Le droit du sang s’applique à chaque enfant né d’un parent français. Il obtient automatiquement la nationalité française dès la naissance et ce, quel que soit son lieu de naissance.
Le droit du sol est un rien plus complexe. Chaque enfant né sur le sol français de parents étrangers reçoit, lui, la nationalité française lors de ses 18 ans, si et seulement si il a vécu cinq ans de sa vie en France entre ses 11 et 18 ans. Aussi, un enfant né en France d’un parent étranger lui-même né en France obtient automatiquement la nationalité française dès sa naissance. C’est ce qu’on appelle le double droit du sol.
Le débat, très clivant, sur la légitimé du droit du sol fait rage en France depuis longtemps. En 2003, Nicolas Sarkozy, né en France de parents étrangers, défendait ardemment le droit du sol dans un débat télévisé face à Jean-Marie Le Pen. Depuis lors, l’ancien président de la République a fait volte-face et émis la volonté de revenir sur le principe même de droit du sol.
Mais si Nicolas Sarkozy semble avoir été définitivement exclu de la politique française, les opposants au droit du sol sont, eux, toujours bien là. Sans surprise, c’est le Front National qui en est l’ennemi le plus féroce. Pour le parti frontiste, la nationalité française ne peut s’obtenir que par filiation. On est français car l’un de ses parents est français, point à la ligne.
Le droit du sang, une absurdité nauséabonde
Mon cas personnel est l’exemple parfait de l’absurdité de cette logique d’un autre âge. Comment peut-on prétendre que moi, à qui l’équipe de France de football donne de l’urticaire et qui me sens aussi français que je me sens malgache ou kazakh, suis un Français plus légitime qu’un travailleur immigré qui participe quotidiennement à l’activité sociale, économique et culturelle française ?
Les enfants de mes enfants seront automatiquement français quand bien même aucun de leur ancêtre sur trois générations n’aura jamais vécu en France. La logique m’échappe.
Entendre en 2017 que l’on n’est français que si son sang est français fait glacer le mien.
Rappelons à Marine Le Pen et à toute sa clique de méritocrates rétrogrades que la raison pour laquelle ils sont français est la même que la mienne : le hasard. La rhétorique nauséabonde sur le sang impur n’existait plus que dans les livres d’histoire, d’Harry Potter ou dans la Marseillaise. Qu’elle y reste.