Le long du chemin du Keelbeek, on trouve des potagers, des fleurs, des animaux, mais maintenant aussi un campement, des vigiles et des grillages. C’est ici que devrait se construire la méga-prison bruxelloise, qui accueillera plus de 1200 détenus. Le chemin du Keelbeek, au milieu du champ, devrait être déplacé pour permettre la construction du centre pénitencier. Mais, ce lundi 19 octobre, la Ville de Bruxelles a rejeté à l’unanimité sa déviation. Le projet est donc bloqué.
Claude est soulagé par cette nouvelle. Il habite depuis plus de 20 ans juste en face du sentier vicinal, qui relie Haren à Diegem. « Je l’ai emprunté des centaines et des centaines de fois. C’est par là qu’on accède aux commerces les plus proches. Si on nous l’enlève, il faudra tout contourner et on devra marcher une vingtaine de minutes en plus ». Selon lui, la commune joue un double jeu. Elle change sans cesse d’avis et ne tient pas les résidents au courant. Il sait que malgré les pétitions signées et l’occupation du territoire, cela ne changera rien. « On a déjà le bruit des avions, maintenant il y aura encore plus de nuisances, sonores et visuelles avec l’arrivée de la prison ».
Un sentier devenu zone à défendre
Sarah vit également à proximité du chemin de Keelbeek, elle déplore le fait que de plus en plus de zones vertes disparaissent près de chez elle. Elle y amenait ses enfants jouer et allait faire son jogging là-bas. « Tout ce bel espace va peut-être disparaître. Cela m’attriste beaucoup. »
Depuis quelques mois, des citoyens ont décidé d’occuper le terrain. C’est devenu une « ZAD », une zone à défendre. Ils veulent la faire vivre en l’habitant ; c’est leur façon de lutter contre ce projet. Mais ils ont été délogés du site il y a quelques jours par la police. Cependant, le propriétaire du terrain juste à côté leur a permis de s’installer chez lui. Aujourd’hui, leurs voisins sont des vigiles, qui campent, eux aussi.
Parmi les zadistes, il y a Mathieu, 24 ans. Il vit là depuis bientôt un mois. Pour lui, il faudrait s’occuper des violences sociétales plutôt que leurs conséquences. Il se dit abolitionniste des prisons. « Je me bats personnellement contre le concept même de prison, mais il y a aussi le fait de préserver les derniers espaces verts aux alentours des villes » explique-t-il. Selon lui, la décision du Conseil communal de ne pas dévier le sentier est un premier pas, mais il ne faut pas se réjouir non plus : ça ne fait que ralentir la construction.
L’annonce de la décision de ne pas dévier le chemin a été malgré tout fêtée au champagne entre les habitants et les zadistes. Une première petite victoire pour ceux qui attendent, avec angoisse, les suites du projet de cette méga-prison.