Des nuits blanches à travailler au cabinet ? Depuis son entrée au gouvernement il y a un peu plus d’un mois, c’est du déjà vu. À 40 ans, Sophie Wilmès est la cinquième présence féminine au sein du gouvernement Michel, remplaçant Hervé Jamar au poste de ministre du Budget. Jusqu’alors députée fédérale et échevine à Rhode-Saint-Genèse, elle est appelée au gouvernement la veille de la remise du rapport du comité de monitoring sur le budget. Elle n’a désormais d’autre choix que de s’adapter rapidement à une nouvelle fonction, une nouvelle équipe et de nouveaux locaux.
« Mon tout premier jour, j’arrive en salle du conseil, une salle que je connais assez bien, mais cette fois-là, c’était différent. Je n’étais pas assise derrière les bancs, je me tenais devant », confie Sophie Wilmès, lorsqu’elle évoque sa première journée au sein de sa nouvelle fonction. « D’un coup, vous devez faire face à une myriade de journalistes, de caméras et d’appareils photos. C’est assez spectaculaire ». Sans compter la multitude d’appels et d’e-mails de félicitations auxquels la ministre a pris plaisir à répondre un à un. Pour l’étoile montante du mouvement réformateur, une chose est sûre, il faudra être à la hauteur de ce premier remaniement du gouvernement.
Une femme de chiffres
Fille de Philippe Wilmès, professeur d’économie à l’UCL, elle est licenciée en communication appliquée à l’IHECS avant de se diriger vers des études de gestion financière à Saint-Louis. De gestionnaire financière à la Commission européenne, en passant par conseillère dans un cabinet d’avocats d’affaires, pour cette quadragénaire qui accède soudain à la notoriété, manier les bouliers compteurs du budget belge s’apparente presque à un jeu d’enfant. Inaccoutumée aux interviews des journalistes, pour l’instant, elle se sent « beaucoup plus à l’aise à étudier les dossiers » qu’à s’exprimer devant les caméras. Ministre du Budget, une fonction pourtant connue pour son rigorisme, cela ne l’effraie pas. Au contraire. « Ce qui fait peur quand on entend budget, c’est qu’on pense aux chiffres. Mais, derrières les chiffres, il y a les équilibres, les orientations, et c’est exactement ça qui me passionne », précise-t-elle avant d’ajouter, « ce qui est complexe au niveau fédéral cette fois, c’est le degré de responsabilité. On parle de dossiers très volumineux. Mais je n’ai pas peur, la peur n’a pas sa place ici ».
Toutefois, le nom de Sophie Wilmès ne s’imposait pas de manière évidente avant la lecture des CV des parlementaires. D’autres candidats étaient attendus, notamment Jean-Luc Crucke, Christine Defraigne ou encore Vincent De Wolf. Mais c’est sans doute son investissement en commission des Finances et du Budget ainsi que son expérience fédérale qui ont fait la différence. « Lorsqu’il y avait des débats sur le budget, j’étais toujours extrêmement attentive et j’avais un désir de m’exprimer là-dessus en tant que parlementaire ». Sans le savoir, la députée observait déjà du coin de l’œil les matières qu’elle allait être chargée de reprendre.
« J’ai toujours été une mère disponible »
Lorsque la proposition au poste de ministre du Budget lui a été faite, « tout s’est passé très vite. Mon cœur me disait oui, ma tête me disait oui, mais cette décision, je ne pouvais pas la prendre seule », confesse la ministre. Consciente que cette décision allait marquer un tournant dans sa carrière politique mais également dans sa vie privée, c’est instinctivement vers son époux, d’origine australienne, qu’elle s’est tournée avant de donner sa réponse. « Il m’a répondu qu’il savait qu’il allait moins me voir, mais que c’était une opportunité formidable ». Mordue de travail, Sophie Wilmès est aussi mère de quatre enfants (Jonathan, Victoria, Charlotte et Elizabeth) et met un point d’honneur à leur accorder la présence maternelle dont ils ont besoin. Dans les couloirs du cabinet, une membre de l’équipe salue la persévérance de la quadragénaire qui, avant d’arriver au cabinet, continue d’accompagner elle-même ses enfants à l’école. « J’ai toujours été là pour eux, mais j’arrive dans une période budgétaire très lourde, et mon temps de disponibilité sera d’autant plus restreint. Une période d’acclimatation sera nécessaire pour chacun », reconnaît-elle, d’un air prévoyant. En inculquant à ses enfants certaines valeurs du travail, elle espère leur faire comprendre l’importance de s’épanouir au niveau professionnel dans « un métier qui nous passionne ».
Pas une minute à perdre
Cependant, « les personnes qui se passionnent pour les matières budgétaires, ça ne court pas les rues », souligne la ministre. « Lorsqu’on accepte cette fonction, il n’y a plus beaucoup de place pour autre chose. Vous devez donner des accords sans quoi les dossiers ne peuvent pas avancer et le pays ne peut pas attendre des mois avant que l’on se décide ». Et pour cause, le jour même de la prestation de serrement devant le roi, moment que la ministre a qualifié d’ « hyper émouvant », elle s’est plongée dans ses nouveaux dossiers. Directement mise à contribution, Sophie Wilmès doit trouver un peu plus de 113 millions d’euros pour maintenir son budget 2015 dans les rails. Elle devra aussi relever des défis de taille : l’assainissement budgétaire d’une part, le glissement fiscal d’autre part. « À côté de ces deux grands challenges, il y aura des couts supplémentaires, dont ceux relatifs à la crise de l’asile », ajoute-t-elle. La ministre en est consciente, le Budget est la compétence qui est scrutée du matin au soir par les responsables politiques. Mais derrière les bouliers compteurs du pays ou sur le chemin de l’école de ses enfants, une chose est sûre, Sophie Wilmès garde la tête froide.