Traiter sans discuter
Une des questions qui persiste dans le débat public autour du TTIP est celle de la transparence. De nombreuses voix s’élèvent pour dénoncer un manque d’accessibilité aux documents témoignant des avancées de cet accord. Martin Pigeon, membre de l’Observatoire Européen des pratiques lobbyistes (Corporate European Observatory), explique que « ces négociations sont maintenues secrètes sous la pression des États-Unis à laquelle la Commission Européenne a été obligée de se soumettre. » Aux États-Unis, le partage de ces documents confidentiels serait considéré par la justice américaine comme un crime fédéral. Cette confidentialité a été imposée aux partenaires européens au titre de la réciprocité.
La Commission Européenne a partiellement répondu aux attentes des citoyens européens en lançant une consultation publique sur l’ISDS (Investor-state dispute settlement) en mars 2014 et en donnant accès à un certain nombre de documents informant de grands thèmes traités lors de chaque round de négociation. Cependant rien ne transparaît concernant les positions des négociateurs. Et le jargon administratif n’en facilite pas la lecture. Selon Bruno Poncelet, un des initiateurs de la plateforme « No-Transat », « La Commission raffole des mots compliqués et abstraits, car c’est le meilleur moyen pour que la société civile ne s’intéresse pas aux politiques qui sont derrière ». Une source institutionnelle européenne évoque quant à elle la fameuse « stratégie du poker », consistant à cacher son jeu à l’adversaire pour éviter toute opposition face à un traité d’une telle importance.
Philippe Lamberts, député européen, regrette que la plupart des documents sur les négociations ne soient transmis qu’à un petit groupe de députés. Pour L’Eurodéputé, « L’opacité favorise les intérêts particuliers et en l’occurrence ceux des multinationales ». Il dénonce la « logique ploutocratique » du Traité.
Face à la contestation et avec le soutien du Commissaire Frans Timmermans, Jean-Claude Juncker, nouveau président de la Commission Européenne, tente de rassurer les esprits. Héritant de la consultation publique lancée par la Commission Barroso et dont la publication des résultats est attendue au courant du mois de décembre, la nouvelle Commission Juncker parviendra-t-elle à faire remonter sa cote auprès des acteurs sociaux ? Affaire à suivre…